Des phares qui se croisent en tournant comme des bestioles. Toutes les cinq minutes. La diffraction dans les lentilles ne donne pas une image aussi claire que le jour, mais sous la lumière des lampadaires je vois la couleur de leurs vestes quand s’ouvrent les portières. Je devine aussi les plaques d’immatriculation. Presque distinctement.
Ma psy ne comprendrait pas. Je dois lui cacher cette nouvelle occupation. Elle n’en voit que les conséquences positives, se félicite de mes progrès, parce que lâcher prise ça aide à arrêter de stresser. Je lance des pièces pour ça. Elle a beau répéter que ma volonté est un moteur ou une voile, on n’est jamais aussi heureux qu’en abandonnant totalement le contrôle. C’est bien ce qu’ils veulent non ? Les patrons et les référent⋅es emploi, prêt⋅es à m’envoyer dans n’importe quel dépôt qui pue le gasoil.
On n’a jamais eu le contrôle de nos existence. On n’a même pas notre mot à dire sur les chiffres d’affaire dont on ne voit jamais la couleur, au SMIC.
Si je dois lui révéler ce que je pense vraiment à la psy, elle va froncer un sourcil en se penchant vers son bureau, avant d’asséner une de ses vérités qui me renverront des années en arrière.
Et puis elle sera obligée de noter, qu’il n’y a “pas d’amélioration”.